samedi

Chapitre 5 - WITH A GIRL LIKE YOU - extraits...

 
 "Les essuie-glaces balaient poussivement le pare-brise lessivé et j'ai l'impression de voyager dans un aquarium. Je ne distingue qu'un horizon aqueux et pas le panneau indicateur espéré... Je roule à vue, l'eau des fossés dégorge sur la voie. J'ai la vision fugitive du visage perdu de Janet Leigh conduisant sous l'averse et trouvant refuge dans le motel tenu par Norman Bates... Cette image n'est guère rassurante. Et la cassette des Stones qui passe et repasse me murmure un « As tears go by » mélancolique :
« My riches can't buy ev'rything
I want to hear the children sing
All I hear is the sound
Of rain falling on the ground
I sit and watch
As tears go by... »
Ça me met la larme à l'œil, je ferais mieux d'écouter un morceau basique et musclé de Status Quo, « Caroline »... mais je n'ai pas trop le goût à faire une recherche dans le fourbi des cassettes.
Dans l'immédiat, le navrant constat est que je me suis égarée, j'ai dû prendre la mauvaise direction au dernier croisement, pas une habitation à la ronde mais une succession de prairies gorgées d'eau alternant avec des bois..."

"- Que se passe-t-il Jumpy ?
J'actionne la poignée et il se rue dehors. La nuit est sombre et épaisse. Les nuages masquent la lune. Un vent froid insidieux m'enveloppe. Je maintiens les pans de mon gilet sur ma poitrine et avance maladroitement à cause des pantoufles. Jumpy se dirige vers le fond du jardin. Je me tords les pieds sur le chemin et appelle mon chien sans succès. J'hésite à poursuivre. J'approche de l'endroit que je m'efforce d'éviter, la maisonnette isolée qui jouxte les grottes... Des bourrasques agitent une girouette rouillée produisant des grincements métalliques. Une fenêtre claque sporadiquement. Une brève lumière, visible d'une ouverture, jaillit entre les murs du bâtiment abandonné, comme une fusée phosphorescente. Puis, une lueur tremblotante se déplace à l'intérieur. Je me fige à distance, n'osant plus appeler Jumpy... Une mélopée crispante s'élève, elle se termine par un ricanement qui me glace le sang..."
 **
"En ce soir du 10 mai 1981, nous sommes une poignée d'amis réunis dans le salon de la rue du Commerce, il est presque vingt heures, la télévision est allumée en sourdine, les fenêtres sont ouvertes sur la rue calme et déserte.
La table déborde de verres, de bouteilles, des sticks circulent... Nous avons peu pioché dans les assiettes d'amuses-gueules. J'ai l'estomac contracté dans l'attente du résultat... Je suis muette d'appréhension dans le brouhaha qui règne. Nicolas discute et plaisante avec la compagnie, il est confiant et m'adresse des clins d'œil pour me rassurer.
Il a attrapé une guitare sèche...
Il s'essaie sur le riff de « Street Fighting Man »... L'air concentré et inspiré, les mèches noires en bataille, ses mains s'agitent sur les cordes de sa guitare, il affecte une imitation gestuelle de Keith et prolonge la sublime intro, toujours si puissante et frissonnante, malgré les années... Christophe remue des maracas façon Brian...
Nicolas lance sa voix :
« Ev'rywhere I hear the sound of marching, charging feet, boy
'Cause summer's here and the time is right for figthting in the street, boy... »
Nous poursuivons en chœur :
« But what can a poor boy do
Except to sing for a rock'n'roll band
'Cause in sleepy London town
There's just no place for a street fignting man... »
Et plus fort :
No !!!
Nico reprend :
« Hey ! Think the time is right for a palace revolution... »
Je danse en tapant des mains et pointe le poste de télévision en gigotant de plus belle...
Plus qu'une minute de décompte...
Tout le monde se fige et fixe l'écran.
Mon cœur bat à tout rompre, le visage de Nico est devenu crayeux.
Les dernières secondes lourdes d'angoisse et d'espoir s'égrènent..."


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